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Emmanuel Bornstein, trois visages de la mémoire

Publié le 8 mai 2021
Temps de lecture : 4 min
Oeuvres Bornstein
© Shannon Aouatah
Emmanuel Bornstein présentera une partie de ses œuvres dans des vidéos diffusées tous les 15 jours sur les réseaux sociaux du Département.

Le Musée départemental de la Résistance et de la Déportation accueille l’exposition "Three letters. Peinture. Écriture. Résistance" de l’artiste Emmanuel Bornstein jusqu’au 20 septembre 2021. 

L’artiste expose pour la première fois une série 94 œuvres, peintures sur papier, qu’il a conçue à partir de lettres et de documents d’archives officiels liés à trois personnes, Carmen Siedlecki, sa grand-mère survivante du camp d’extermination d’Auschwitz, Franz Kafka, le fils révolté, et Éric l’ami de jeunesse disparu. Il y intervient directement par collages et gouaches sur des documents imprimés ou manuscrits. Une partie de ces documents est notamment constituée d’écrits officiels du "Ministère des Prisonniers, Déportés et Refugiés" (1944), ainsi que de la "Fédération nationale des Déportés et Internés patriotes" (1946).
 

Une exposition accessible en ligne

En raison du contexte sanitaire et de la fermeture des lieux culturels, l’exposition n’est pas physiquement ouverte au public mais vous pouvez la retrouver en ligne, comme si vous étiez au Musée départemental de la Résistance et de la Déportation !

L'artiste explique ses oeuvres

Afin de faire vivre cette installation inédite au Musée départemental de la Résistance & de la Déportation, le Conseil départemental a proposé à Emmanuel Bornstein de présenter une partie de ses œuvres dans des vidéos diffusées tous les 15 jours sur les réseaux sociaux de la collectivité.

Le samedi 13 mars,. la première de ces diffusions a été consacrée à l’œuvre Carmen 1945, le 27 mars, Carmen 1961, le 10 avril  Eric lettre 1, le 24 avril "Eric Ange bleu", le 8 mai "Franz lettre au père 3".

La prochaine diffusion aura lieu le 22 mai avec "Franz lettre au XIV"

Ces vidéos seront aussi accessibles depuis l'exposition virtuelle.

Interroger, interpeller et transmettre l’histoire au plus grand nombre

En invitant dans ses murs Emmanuel Bornstein, le Musée départemental de la Résistance & de la Déportation marque sa volonté de donner une large place à l’art contemporain dans un lieu dédié à l’Histoire et à la Mémoire. En proposant au public de découvrir "Three Letters. Écriture. Peinture. Résistance", le Conseil départemental souhaite interroger, interpeller et transmettre l’histoire au plus grand nombre, à travers le regard et la lecture contemporaines d’un artiste engagé.

Né à Toulouse en 1986 d’une famille du milieu théâtral, Emmanuel Bornstein suit sa scolarité au lycée Saint-Sernin. Il poursuit ses études entre l’École Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris et l’Université des Arts de Berlin, où il est installé depuis 2011. Reconnu comme une valeur montante de l’art contemporain, Emmanuel Bornstein a été récompensé par plusieurs prix, avant d’être exposé par près d’une quarantaine de galeries, musées et salons européens en à peine 10 ans.

"Plus qu’un acte de résistance, l’énergie artistique d’Emmanuel Bornstein est un acte de libération et de générosité qui donne à penser, à admirer, à s’émouvoir. Nous sommes fiers d’accueillir ses œuvres puissantes qui témoignent d’un intérêt commun pour entretenir notre mémoire collective. A travers cette exposition, le Musée départemental de la Résistance & de la Déportation assume et renouvelle pleinement sa triple mission historienne, mémorielle et citoyenne afin de permettre à toutes les générations de questionner le passé, le présent et l’avenir", souligne Anne Boyer, vice-présidente du Conseil départemental en charge de la Culture.

Emmanuel Bornstein : "Ce projet est venu à moi"

Pourquoi cette exposition vous tient-elle à cœur ?

Ce projet est venu à moi, je ne l’ai pas conceptualisé, réfléchi. Kafka a toujours été une figure inspirante et le manuscrit de Lettre au père était partie intégrante de ma première exposition à Berlin. Je suis souvent revenu sur ce texte, je l’ai imprimé et pour la première fois, en 2017, j’ai accompli le geste inédit pour moi de peindre sur et avec les mots de Kafka. Quelques mois plus tard, le couple Klarsfeld donnait une conférence à Toulouse et une chercheuse présente révélait à mon père l’existence de documents concernant ma grand-mère Carmen. C’était une révélation, un choc de découvrir le parcours extraordinaire de son retour des camps de concentration grâce à ces sources précises qui nous étaient complètement inconnues et je me suis également emparé de ces documents.

L’exposition évoque aussi le destin tragique de l’un de vos amis...

Éric était un ami d’enfance très cher, qui lui même a beaucoup écrit, et dont j’ai appris le décès au cours de la même période. Il m’avait écrit beaucoup par mail et trois lettres après un accident qu’il a eu en 2006, auxquelles je n’ai pas su répondre plus jeune. Quand j’ai appris son suicide, j’ai relu ses lettres et j’ai découvert qu’elles m’étaient en fait adressées. Et j’ai commencé à faire ce deuil en imprimant ses lettres, en les recouvrant et en laissant apparaître des parties, des mots. J’ai commencé ainsi à tisser des liens entre ces trois personnes.

Emmanuel Bornstein
© Chloé Desnoyers