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« L’égalité sociale est le principal facteur de lutte contre les discriminations »

Publié le 1 mars 2021
Temps de lecture : 2 min
François Dubet
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François Dubet participera à la conférence-débat "Covid: accélérateur des inégalités", le 5 mars, lors des Rencontres pour l'égalité.

Pour le sociologue François Dubet, professeur émérite à l’université de Bordeaux, il est essentiel de dénoncer systématiquement toute discrimination tout en assurant à chacun des conditions de vie égalitaires pour espérer y mettre fin. 

Qu’est-ce qu’une discrimination ?
On est discriminé dès lors qu’on est traité de manière inégalitaire non pas en fonction de ses compétences, de sa valeur ou de ses mérites, mais en fonction de son identité. Si une femme est moins payée qu’un homme, toutes choses égales par ailleurs (même niveau d’études, même expérience professionnelle, etc), elle est discriminée.

Les discriminations sont-elles plus fréquentes de nos jours ?
Non, au contraire. Mais alors qu’on a discriminé massivement pendant longtemps, sans que cela ne pose problème, aujourd’hui, les discriminations nous scandalisent car on se réclame – légitimement - d’un droit à l’égalité beaucoup plus qu’autrefois. Notre façon de voir la société se transforme progressivement. Pour preuve, au début des années 2000, il n’existait encore qu’une dizaine de critères de discrimination (sexe, religion, origine, handicap…). Aujourd’hui, la loi en reconnaît plus de 25, parmi lesquels l’apparence physique ou encore, le dernier en date, l’accent. 

Discrimination mesurée et discrimination vécue

Pour autant, il n’est pas toujours facile de se dire discriminé…
Il n’y a pas toujours de correspondance exacte entre une discrimination mesurée - grâce à des techniques de testing banales, comme l’envoi d’un même CV avec un prénom maghrébin d’un côté et un prénom français de l’autre – et la discrimination vécue, notamment parce qu’il est souvent difficile, à l’échelle d’un individu, d’en avoir la preuve formelle. La personne discriminée se dira souvent : « Je n’ai pas été retenu.e pour ce poste, peut-être à cause de mon surpoids. Mais on ne m’a ni insulté, ni maltraité… Donc c’est peut-être de ma faute. » Ou alors : « On m’a refusé cet appartement, c’est sans doute à cause de la couleur de ma peau mais je préfère penser que ce n’est pas ça. »

Comment peut-on lutter efficacement contre les discriminations ? 
Il faut évidemment continuer de condamner tout acte raciste, antisémite, sexiste… Dans le même temps, il est nécessaire de tout mettre en place pour parvenir à une certaine égalité sociale. C’est le principal facteur de lutte ! A l’échelle d’une collectivité, il s’agit de s’assurer que tout le monde bénéficie de conditions de vie égalitaires, en ayant par exemple un même accès aux services publics, quel que soit le lieu d’habitation.