PORTRAIT

Derrière les paillettes, la lutte continue encore…

Publié le 26 mai 2025
Temps de lecture : 4 min
© Aurélien Ferreira/CD31

Arrivé à tout juste 20 ans à l’association PRIDE Toulouse qui coordonne, chaque année, la Marche des fiertés à Toulouse, Benjamin Douglade en est devenu co-président il y a deux ans. Le 7 juin 2025, ce sera la 30e édition de l’événement qui se veut festif mais aussi avant tout revendicatif. Rencontre.

Cela va faire deux ans que Benjamin Douglade, 27 ans, a pris les rênes de PRIDE Toulouse qui organise, chaque année, avec l’appui de 45 autres associations, la Marche des fiertés dans la Ville rose. « Je suis co-président avec deux amies Amandine et Pauline », précise-t-il. C’est à tout juste 20 ans qu’il rejoint Pride, alors qu’il n’est encore qu’étudiant en géographie. D’abord bénévole, Benjamin Douglade va ensuite occuper différentes fonctions dans l’association : secrétaire, trésorier et enfin la co-présidence de Pride. Rien ne le prédestinait pourtant à devenir un des membres les plus actifs de la structure, lui qui grandit dans une petite ville du bassin sidérurgique lorrain, dans un milieu très éloigné du monde LGBT : « Je suis arrivé à Toulouse pour poursuivre mon master en transport et mobilités. Je commençais tout juste à m’assumer comme homosexuel, à être celui que je voulais être».

Embarqué dans le militantisme

« C’est à partir de ce moment-là que j’ai voulu m’engager pour défendre une cause qui me touchait. Pride était donc une évidence », raconte-t-il, lui qui a tout construit «amicalement, professionnellement et associativement » à Toulouse et ne se verrait pas repartir. Par bien des égards, cet éloignement familial lui a permis d’être pleinement lui-même. C’est ensuite au fil des rencontres et de films qu’il découvre, sur la transidentité, les intersexes ou les thérapies de conversion, qu’il est embarqué dans le militantisme. Cela ne va pas de soi au début. Au début, il n'était pas enthousiaste à l'idée de défiler dans les rues pendant la Marche des fiertés, il trouvait cela un peu "vulgaire" avant de comprendre le sens politique de la manifestation, tout l’histoire et les luttes derrière cet événement. Naît alors le besoin impérieux de continuer ce que d’autres ont commencé avant lui. Cette histoire le prend aux tripes : « J’ai envie de porter haut ces couleurs-là, de continuer le combat. Chaque année, on rempile quand on voit ce qu’est capable de faire le collectif », résume Benjamin Douglade qui jongle aujourd’hui entre investissement associatif à haute intensité et travail tout aussi prenant comme responsable du transport scolaire des élèves en situation de handicap au Conseil départemental : « Ma responsable, Anne, est très compréhensive », confie-t-il dans un sourire.   

30 ans de marche, 30 ans de lutte

En 2025, la Marche des Fiertés à Toulouse fêtera ses 30 ans. Le slogan choisi cette année « 30 ans de marche, 30 ans de lutte » résume bien l’état d’esprit du président de Pride, préoccupé par les reculs des droits des personnes LGBTQIAP+ dans le monde : « Nous pouvons être légitimement inquiets quand on voit ce qu'il se passe aux États-Unis avec la remise en question de la transidentité ou le refus de la non-binarité. Plus près de nous, en Italie, les droits des femmes lesbiennes sur la PMA et l’adoption sont mis à mal, et en Hongrie, on ne peut même plus faire de Marche de fiertés, alors que ces pays-là sont membres de l’Union européenne, une institution censée garantir ces droits-là ». Sans oublier la libéralisation des discours conservateurs et extrémistes dans certains médias. 

Rien n’est gravé dans le marbre

Raisons de plus de rester vigilants et battre le pavé, malgré le contexte pas forcément évident et sachant que l’engagement associatif traverse une période critique, faute de bénévoles. Une situation qui désole Benjamin Douglade : « Jamais rien n’est gravé dans le marbre et rien n’est acquis, il faut se battre pour conserver nos droits ». Il sera donc au 1er rang le 7 juin. À donner le départ de la manifestation dans le char de tête, tel un chef d’orchestre, avec l’espoir que tous les participants passent une bonne journée et défilent en toute sécurité en affichant ce qu’ils veulent être. Sans doute à ses côtés verra-t-on, comme l’an passé, ses parents, Philippe et Laurence, venus spécialement de Lorraine. Fiers et heureux pour leur fils. 

À propos de la Pride Toulouse 2025


En 2025, l’association PRIDE Toulouse a souhaité créer un visuel fort en symboles en faisant appel à Mathieu Jeanneau, « photographiste » parisien pour décliner à sa guise le slogan choisi cette année : « 30 ans de marche, 30 ans de lutte ». Librement inspirée de « La Liberté guidant le peuple » d‘Eugène Delacroix, l’affiche de la 30e marche des Fiertés reprend les codes de ce chef d’œuvre et joue sur sa portée politique ; ce tableau symbolisant la République française, la liberté et la démocratie à travers le monde. Le challenge à relever pour l’artiste était triple : identifier Toulouse grâce à l’un de ses monuments emblématiques, prôner l’inclusivité en montrant la diversité de la communauté, afficher la légèreté et le côté festif de l’évènement doublé d’un aspect foncièrement politique et militant. En 2025, l'association a l'honneur d'avoir à ses côtés, une marraine et un parrain : Sandra Forgues, médaillée d’or de canoë-slalom aux Jeux olympiques d’Atlanta en 1996 et l’une des premières grandes championnes à s’assumer en tant que femme transgenre et Edward-Jeanne Cerdan, l’Influenceur qui bouscule les clichés en expliquant à travers ses publications, avec beaucoup d’humour et de pédagogie, ce qu’est la transidentité.